Hyperthermie d’effort: comment l’éviter?

Hyperthermie d'effort: comment l'éviter?
Hyperthermie d’effort: comment l’éviter?

Avec le retour des chaleurs estivales, fréquemment caniculaires désormais, le maintien d’une température corporelle compatible avec l’effort de randonnée constitue une indispensable réflexion préventive.

Par le Docteur Robert Lots, membre de la Commission Médicale de la FFRandonnée

Si l’être humain est une espèce à sang chaud, il vit avec une température corporelle constante, oscillant autour de 37° C pour les viscères (noyau central). Les variations sont minimes. La thermorégulation maintient cet équilibre constant entre thermogenèse, c’est-à-dire la production de chaleur, et thermolyse, l’évacuation de la chaleur humaine.

Selon les méthodes (lieux) de prise de température, la normalité se situe :

  • entre 34,7° C et 37,3° C pour la prise axillaire,
  • entre 35,5° C et 37,5° C pour la prise buccale,
  • entre 35,5° C à 38° C pour la prise auriculaire,
  • 36,6°C à 37,6° C pour la prise rectale.

Mais en activité physique nous ne transportons pas de thermomètre médical !

Hyperthermie: quelques définitions

L’hyperthermie (ou fièvre) désigne une température corporelle mesurée au-delà des valeurs ci-dessus. La prise d’un médicament contre la fièvre dépend de la tolérance de chacun, qui varie fortement. Certains sont « comateux » à 38° C, beaucoup d’enfants jouent encore avec 39°¨C. Comme les protéines corporelles se déforment à partir d’une température locale de 41-42° C on comprend qu’il ne faut pas atteindre, ni approcher ce seuil.

Au-delà de 39,5° C la situation est dangereuse si elle dure plusieurs heures ou jours, entraînant des complications, des séquelles ou même le décès. Le cerveau en particulier est extrêmement sensible à la fièvre, c’est pour cela qu’il est situé hors du noyau central (le tronc), bien aéré. Les risques cérébraux sont les plus à craindre : AVC, coma, convulsions…

La fièvre diffère de l’hyperthermie d’effort. Elle est due à la production de substances pyrogènes par nos globules blancs stimulés par un agent infectieux (virus ou bactérie) ou par la consommation de stéroïdes (cortisone, anabolisants), que ce soit comme thérapeutique ou comme dopant. La fièvre est due à un dérèglement de notre thermostat hypothalamique, situé dans la partie profonde du cerveau.

L’hyperthermie d’effort représente un déséquilibre entre la chaleur (thermogenèse) produite par l’activité physique musculaire et l’insuffisance de sa dispersion par la température ambiante trop élevée, par une baisse de la sudation en atmosphère humide ou par manque d’hydratation ou toutes les combinaisons de ces causes. Les médecins militaires l’appellent « coup de chaleur d’exercice ».

Le coup de chaleur est lié à une température ambiante très élevée sur plusieurs jours sans défervescence nocturne permettant la récupération de notre organisme. Il est fréquent en période de canicule.

L’effort à risque hyperthermique

L’hyperthermie se rencontre surtout pour des efforts intenses et prolongés (marathons, travail du bâtiment en été, etc.), lorsque les mécanismes de régulation sont dépassés.

En dehors de la fièvre, notre corps régule notre température interne en diminuant la thermogenèse, en limitant les activités physiques au minimum (la sieste des Méditerranéens) ; mais aussi en se protégeant des sources de chaleur (mise à l’ombre), en évacuant la chaleur (thermolyse) par la sueur. L’évaporation de la sueur consomme de l’énergie calorique : rappelez-vous qu’en entourant une gourde d’eau (non isolée et à l’air libre) d’un linge humide, on maintient la fraîcheur du contenu.

On accélère ce procédé de déperdition calorique par vaporisation en se mouillant le corps et surtout la tête (casquette humide), en se ventilant : le flux d’air accélère l’évaporation.

Ces moyens peuvent être insuffisants si la température ambiante est trop élevée, si l’activité physique est pratiquée en période de canicule, ou entre 10 et 18 heures l’été, en plein soleil, en milieu confiné non climatisé. ; mais aussi en ambiance chaude et humide. L’humidité ambiante diminue l’évaporation de la sueur. Il arrive que la thermolyse soit insuffisante lors d’une diminution de la sueur qui peut être due à un manque d’hydratation, le corps retenant alors l’eau pour ses besoins indispensables (sang). Il faut donc boire souvent et suffisamment.

Comment être averti du danger ?

L’hyperthermie provoque une série de signes qui peuvent ne pas être reconnus comme une alerte par la personne hyperthermique ou son entourage :

  • Une sensation de chaleur avec une rougeur cutanée ou une sensation de froid et des frissons au passage à l’ombre, dans le vent ou à l’arrêt ;
  • Une accélération du rythme cardiaque au-delà de ce que l’activité pourrait provoquer. Une dilatation des vaisseaux cutanés peut augmenter le débit circulatoire des glandes sudoripares, donc la sueur. Cela peut entraîner une baisse du volume sanguin circulant pour les organes internes, avec pour compenser le débit une augmentation de la fréquence cardiaque ;
  • Une augmentation de la fréquence respiratoire qui aide à la thermolyse en expirant de l’air chaud ;
  • Une fatigue qui casse l’effort, un ralentissement des réponses aux sollicitations d’autrui. Plus rarement un état d’agitation ;
  • Des maux de tête, des douleurs musculaires et/ou articulaires ;
  • Une déshydratation repérée par la soif impérieuse, qui s’atténue avec la gravité de la situation. Elle peut être masquée par la diminution de la vigilance ou aggravée par des vomissements et/ou de la diarrhée ;
  • La raréfaction des urines qui deviennent plus foncées, moins abondantes, voire nulles. Il n’y a plus aucun besoin d’uriner.

Ces signes à leur début peuvent être attribués à l’activité physique car, à l’effort le cœur s’accélère, on respire plus vite, on a chaud, on a le visage rouge, on fatigue et il faut se motiver pour avancer.

Il faut donc parfaitement connaître ses possibilités et ses réactions dans des conditions d’effort similaire mais en atmosphère fraîche, pour pouvoir détecter les signes avant-coureurs d’une souffrance inhabituelle de l’organisme.

Comment éviter l’hyperthermie?

Au-delà de la température-seuil, la situation est grave et peut être mortelle. Pour ne pas atteindre ce seuil dangereux, quelques précautions s’imposent :

  • Ne pas pratiquer une activité physique modérée à intense :
  • S’il y a une alerte canicule,
  • Pendant les heures très chaudes de l’été, entre 10 h et 18 h ;
  • Si l’on est déjà fiévreux, même très peu. Ce n’est peut-être que le début de l’infection, et la fièvre peut augmenter. Il est formellement contre-indiqué de faire un effort sportif avec de la fièvre si peu que ce soit ; on risque la myocardite lors d’une infection virale (mise en garde des cardiologues du sport) ;.
  • Pratiquer avec des vêtements adaptés, légers, amples pour évacuer la sueur, ou des vêtements techniques qui évacuent celle-ci ;
  • Boire suffisamment c’est-à-dire régulièrement mais sans excès non plus. La sueur doit être présente, la bouche humide, la sensation de soif juste perceptible ;
  • Ne pas consommer de boissons alcoolisées. L’alcool dilate de force les artères et augmente considérablement le volume des urines, aggravant la déshydratation ;
  • Veiller à ses compagnons d’activité : être en éveil en cas
  • de ralentissement inhabituel de leur activité, en cas de désorientation (réponse inappropriée à une question ou une situation simple), en cas de maux de tête, en l’absence de sueur par comparaison avec la vôtre ;
  • Encourager tout le monde à s’hydrater régulièrement, se rafraîchir. 

À garder en tête

L’hyperthermie d’activité est rare, mais pas exceptionnelle. Non prise en compte, elle s’aggrave, conduit au coma, à des hémorragies cérébrales, à des défaillances de tous les organes et au décès. Les précautions indiquées et appliquées devraient vous éviter cette situation.