Trail: fatigue et problèmes de récupération

La fatigue et les problèmes de récupération
La fatigue et les problèmes de récupération

Les épreuves sportives d’ultra-endurance durant plus de 24 h imposent aux athlètes une privation de sommeil, qui peut engendrer une forte somnolence associée à des troubles cognitifs et moteurs importants. Or, il ne fait aucun doute que le sommeil est fondamental pour la performance cognitive et sportive. Bien que les fonctions du sommeil ne soient pas encore bien comprises, sa relation à la performance est évidente à travers la détérioration des fonctions cognitives sous des conditions de privation de sommeil et l’observation du temps de récupération nécessaire après les courses.

Par Anne Odru avec le docteur Patrick Basset, directeur médical chez Dokever

Le sommeil, meilleur remède contre la fatigue

Il existe différents niveaux d’approches pour analyser la fatigue d’un sportif : « La fatigue et le sommeil sont liés. Il faut un sommeil de bonne qualité pour récupérer après une course d’endurance et ne plus être fatigué. » Voici la base posée par le docteur Patrick Basset qui travaille sur l’UTMB® depuis 14 ans.

Il a vu évoluer la pratique de l’ultra-trail, depuis tout ce temps, de quoi lui permettre aujourd’hui de donner les conseils les plus avisés :

  • Ne pas faire plus d’un ultra-trail par an ;
  • Se fixer des objectifs cohérents afin d’éviter la surfatigue, qui peut avoir des conséquences dramatiques sur le quotidien (vie personnelle, vie professionnelle, désociabilisation…). L’équilibre est compliqué à trouver mais il faut y accorder une très grande importance ;
  • Se fixer des règles de sommeil comme essayer de dormir
    8 heures par nuit, durée qui permet de récupérer et de bien se reposer ;
  • Intégrer le phénomène de sieste qui permet de reprendre de l’énergie et d’éviter l’accumulation de fatigue. C’est le meilleur moyen de préparer son sommeil et de mieux dormir la nuit également.

Mieux se gérer avant, pendant et après la course

Pour mieux gérer sa fatigue durant une course, il faut prévoir quelques siestes sur le parcours. Une habitude à adopter avant, pendant et après la course.

« Il faut absolument éviter une fatigue trop importante. Le cerveau a une capacité d’absorption de la fatigue propre à chacun, évitez donc de dépasser votre limite. Pour cela, il faut bien se connaître en faisant des tests de sieste et adapter son rythme de sommeil et ses horaires de nuit. Le mieux étant de fonctionner par palier pour déterminer et repousser progressivement ses limites. »

La fatigue peut avoir des conséquences importantes ; le cerveau étant moins réactif, c’est le meilleur moyen de faire des erreurs, de se blesser pendant une course, ou de nuire à son quotidien pendant sa préparation et sa récupération.

« Privilégiez un plan d’entraînement progressif ; dans l’idéal, monitorez votre sommeil et votre fatigue. Il existe des tests de vigilance qui vous permettront de maitriser votre ressenti et vos besoins à ce niveau. »

Ayez votre stratégie

Des différences individuelles de vulnérabilité dans la perte de la performance au cours de la privation de sommeil ont également été remarquées en laboratoire mais peu encore dans des études de terrain. Néanmoins, il semble important que chaque traileur parte en course avec sa propre stratégie de sommeil et non celle de son partenaire de club car vous n’avez peut-être pas la même puissance de batterie. Personne ne devrait se sentir faible de prendre du sommeil en course. Dans une étude conduite lors de l’UTMB 2013, la plupart des coureurs considéraient le sommeil comme un élément important de la préparation. La stratégie semblant la plus efficace en matière de performance était basée sur des nuits plus longues les jours précédant la course alors que des entraînements en privation de sommeil étaient néfastes pour la performance. Bref, là encore, l’idée est de « recharger la batterie » au maximum avant la course.

Quelques références :

  • Hurdiel, R., Pezé, T., Daugherty, J., Girard, J., Poussel, M., Poletti, L., … & Theunynck, D. (2015). « Combined effects of sleep deprivation and strenuous exercise on cognitive performances during The North Face® Ultra Trail du Mont Blanc®(UTMB®) ». Journal of Sports Sciences, 33(7), p. 670-674
  • Dudoignon, M., Hurdiel, R., & Jardri, R. (2016). « Troubles hallucinatoires lors de l’Ultra Trail du Mont Blanc® 2015 (UTMB®): description et effet de la dette de sommeil. » Médecine du Sommeil, 13(1), p. 26
  • Poussel, M., Laroppe, J., Hurdiel, R., Girard, J., Poletti, L., Thil, C., … & Chenuel, B. (2015). « Sleep Management Strategy and Performance in an Extreme Mountain Ultra-marathon ». Research in Sports Medicine, 23(3), p. 330-336.
  • Heinzer, R., Saugy, J. J., Rupp, T., Tobback, N., Faiss, R., Bourdillon, N., … & Millet, G. P. (2016). « Comparison of Sleep Disorders between Real and Simulated 3,450-m Altitude. Sleep ».

Effets de la sieste

La dissipation de la pression homéostatique pendant le sommeil est considérée comme un processus exponentiel, où plus le niveau de pression homéostatique atteint au cours de l’état de veille est élevé, plus la dissipation pendant le sommeil ultérieur est rapide. Vous suivez toujours ? Au début du sommeil, votre batterie se recharge très vite, et moins après. Finalement, c’est bien la même chose avec votre téléphone portable, non ?

Cela implique que la récupération des déficits de performance causés par le manque de sommeil devrait se produire rapidement, même si le temps disponible pour le sommeil est relativement court.

Dans ce sens, en 2015, nous avons remarqué que la prise d’une sieste de quelques minutes avait permis de faire diminuer significativement le nombre de cas d’hallucination chez des finishers de l’UTMB aux alentours de 37 h (soit deux nuits en course).

Malheureusement, la stratégie de la sieste a un effet négatif appelé « l’inertie du sommeil », qui est la détérioration des performances cognitives, phénomène en général observé immédiatement après le réveil (la tête dans le pâté, nous n’avons pas voulu choisir d’élément anatomique descriptif).

L’importance de l’inertie du sommeil semble être fonction de l’augmentation trop importante de la pression homéostatique et de la durée des siestes. Des siestes très courtes (d’environ 10 à 20 minutes) peuvent offrir des avantages de récupération sans atteindre des niveaux notables d’inertie du sommeil. Toutefois, la sieste « stratégique » ne peut pas être considérée comme un substitut universel, il faudra donc un jour ou l’autre donner assez de temps à votre chargeur
pour remettre votre batterie en état.

Plus d’informations sur www.utmbmontblanc.com