UTMB: « il faut éduquer les athlètes»

UTMB: il faut éduquer les athlètes
UTMB: il faut éduquer les athlètes

Le docteur Patrick BASSET est médecin, anesthésiste, réanimateur et sportif ! Acteur du monde médical sportif aux multiples casquettes, il est directeur médical chez Dokever depuis plus de 20 ans, société d’assistance médicale pour des évènements sportifs outdoor comme le Marathon international de paris, l’UTMB et l’étape du Tour de France. La liste est encore longue puisqu’il est également Président et fondateur d’Ultra Sports Science, fonds qui finance des projets de recherches dans les sports, communique les résultats de la recherche et mets en place un programme de sante pour protéger les athlètes ou encore interface les résultats avec le monde de l’entreprise par le capital santé des salaries. Son CV fait de lui une référence « santé » sur les évènements sportifs, et plus particulièrement sur l’UTMB où il est le directeur médical depuis 13 ans.

Comment a évolué le service médical depuis votre arrivée sur l’UTMB en 2008 ?

Patrick BASSET: L’UTMB nécessite de la recherche et des changements permanents. Les coureurs sont passés de 1 500 à 10 000 sur la course, les distances et les efforts ont changé également. Tout ceci demande de l’analyse et de s’adapter. Nos outils nous permettent désormais de faire de la big data et de l’analyse du sportif afin de mieux comprendre les besoins ainsi que la philosophie des soins. Nous ne souhaitons pas être dans les soins qui augmentent la performance mais dans ceux qui veillent à l’urgence vitale.

Le soin de « confort » n’est pas la priorité, nous sommes plutôt là pour répondre à la pathologie grave. Le service médical est formé pour être capable d’agir en montagne et répondre aux différentes blessures et pathologies que nous pouvons rencontrer sur l’UTMB. Les sportifs sont également de plus en plus curieux sur leur état de santé et souhaite obtenir un maximum d’informations sur leur condition physique. C’est pourquoi nous avons mis en place des procédures d’éducation pour les soignants mais également pour les sportifs depuis plusieurs années.

Quel est le dispositif mis en place pour la lutte contre le dopage ?

Patrick BASSET: L’ultra-trail est un sport sous la surveillance de l’agence mondiale antidopage en tant que discipline de l’athlétisme « hors stade ». Les courses sont donc soumises aux mêmes règles que toutes les courses d’athlétisme. Il existe une liste de médicaments bannis par l’AMA et nous pouvons être soumis à des contrôles antidopage qui seront établis comme le veut le protocole officiel.

Cependant, nous ne parlons pas de dopage sur l’UTMB. Nous avons mis en place une politique de santé qui nous oblige à veiller à ce que les informations soient correctement relayées auprès des athlètes pour les mettre en garde si jamais le médical leur propose un médicament considéré dopant pendant la course. Il existe également un règlement de course qui essaie d’éduquer les sportifs à pratiquer sans médicaments depuis des années. Nous misons sur la transparence et la communication auprès de l’athlète.

Il y a les traileurs pros et les amateurs, comment sensibiliser les amateurs à ce sujet qui peut être trop mal connu vis à vis de la prise de médicaments ?

Patrick BASSET: Nous nous adaptons pour cela au niveau de pratique des coureurs, de celui qui vise le podium avec une préparation intense, parfois trop, à l’amateur qui ne maîtrise pas forcément sa condition physique. Nous restons dans la bienveillance pour viser un sport propre sans médication, et surtout, sans automédication. En cas de besoin de traitement spécifique comme pour un asthmatique par exemple, nous allons mettre en garde l’athlète et le prévenir qu’il ne doit pas prendre le départ.

Les élites peuvent également se tourner vers nous afin de les conseiller sur une prise de médicament comme a pu le faire Kilian Jornet à cause d’une piqûre de guêpe avant un départ il y a quelques années. Nous l’avons mis en garde sur les médicaments à ne pas prendre. Tout le monde n’est pas forcément conscient qu’un anti-inflammatoire est dangereux  et peut être considéré comme potentiellement dopant, c’est notre rôle de bien les informer.

Est-ce une épreuve touchée par le dopage ?

Patrick BASSET: Nous avons eu des suspicions sur des athlètes il y a quelques années, nous l’avons donc signalé aux autorités compétentes. Ces athlètes se sont avérés dopés et ont été disqualifiés. Mais il est difficile de savoir si cette course est vraiment touchée par le dopage car pour nous et selon notre philosophie du sport sans médicament alors le moindre anti-inflammatoire vous mets dans la case de « l’Automédication » qui est dangereuse pour le corps Il y en a sans doute mais ce sont les instances qui font les contrôles qui peuvent le savoir…

Mon rôle est de prévenir et de suivre les athlètes mais nous ne pouvons pas tous les contrôler. Nous cherchons surtout à savoir quel est leur état de santé et si leurs soins et traitements sont bons pour eux et pour leur pratique sportive. Nous privilégions la « sanction » par l’éducation et par la prévention.

Triathlète, marathonienne Directrice de la publicité et du développement