Les blessures du cycliste

Les pathologies spécifiques du cycliste
Les pathologies spécifiques du cycliste

Les bienfaits de la pratique cycliste pour la santé et la capacité à poursuivre cette activité avec l’âge sont maintenant bien démontrés. On peut citer comme exemple Robert Marchand notre compatriote centenaire dont les records ont été très médiatisés, mais cette pratique peut également entraîner, si l’on ne fait pas attention à certaines règles, des pathologies diverses assez spécifiques.

Par le docteur Claude Marle, Médecin Fédéral Régional et du team Delko Marseille Provence KTM

La pratique du cyclisme a comme avantage d’être effectuée en décharge, c’est-à-dire sans contraintes liées au poids, contrairement à la course à pied, souvent source de nombreuses blessures.  Elle a en revanche une exigence, c’est de respecter un bon placement et un équilibre du corps sur le vélo au risque de voir apparaître des douleurs et de réelles pathologies.

Les pathologies liées à une inadaptation du couple cycliste-machine entraînant des microtraumatismes répétés

Les tendinites

Du tendon rotulien ou du quadricipital ; il s’agit de douleurs sur ces tendons lors de la pratique, surtout si la durée est longue et/ou intense associée à de mauvais réglages tels qu’une selle trop basse ou trop avancée.

À contrario, une selle trop haute peut favoriser des douleurs et des tendinopathies sur l’arrière de la jambe au niveau des mollets ou des ischio-jambiers. Des tendinites au niveau de la partie interne du genou (patte d’oie) peuvent également survenir si le sujet porte des chaussures avec des cales automatiques et qu’il y a soit en raison d’un mauvais réglage de la cale sur la chaussure entraînant une rotation externe du pied, soit si la personne a une rotation externe de hanche importante et un positionnement de la cale non adapté.

Le syndrome rotulien

C’est un problème fréquent, généralement lié à une pratique avec des braquets trop importants pendant un temps trop long. C’est aussi parfois par un positionnement trop haut de la selle ou une reprise de pratique intensive après un arrêt prolongé.

Il est très important d’être progressif lors des phases d’entraînement et de compétition. Ce syndrome peut également être favorisé par un défaut anatomique du genou – dysplasie patellaire et/ou trochléenne – qui s’exprime souvent vers l’adolescence.

L’utilisation des cales automatiques a l’inconvénient des chutes lors de l’apprentissage, mais permet en revanche des phases de poussée et de traction qui utilisent alors de manière équilibrée l’ensemble des muscles des membres inférieurs. 

Les douleurs du rachis

Le positionnement du sujet sur son vélo est très important, fonction de la taille du cadre du vélo qui doit être choisi selon la morphologie du cycliste. Une selle trop haute par rapport au guidon ou une taille du cadre inadaptée du vélo peut favoriser des cervicalgies par hyperextension du cou. Une différence de longueur de jambe supérieure à un centimètre non compensée, un bec de selle ou une selle trop relevée peuvent favoriser des lombalgies. Il faut néanmoins dire ici que la plupart des lombalgies ne sont pas une contre-indication à la pratique du cyclisme.

Les divers problèmes du siège

Ils sont liés le plus souvent à une mauvaise selle (trop large ou trop étroite, trop souple ou usée) mais aussi à un défaut d’hygiène cutanée ou l’absence de changement régulier de cuissard. Cela peut aussi venir d’une selle trop basse favorisant un appui préférentiel sur l’arrière. Ces problèmes de santé, bursite, folliculite, le fameux troisième testicule (induration localisée) doivent être pris en charge sans délai.

Les pathologies neurologiques du poignet

Un guidon trop bas ou mal positionné peut favoriser des hyper-appuis au niveau des paumes comprimant les nerfs radiaux ou ulnaires sur les éminences thénar ou hypothénar. Un poignet trop fléchi peut étirer le nerf médian. Ces traumatismes des nerfs engrainent des fourmillements au niveau de certains doigts avec une atteinte sensitive ou motrice. Outre les modifications de réglage et l’utilisation de gants bien rembourrés, il faut traiter rapidement ces douleurs liées aux souffrances de ces nerfs périphériques pour éviter les

Les macro-traumatismes

Le risque principal de la pratique cycliste est la chute. Il existe diverses pratiques, de la route en passant par le cyclo-cross et le VTT à la piste ou le BMX qui entraîne des traumatismes parfois légèrement différents. On observe le plus souvent :

Les fractures de la clavicule

C’est le sport le plus pourvoyeur de cette pathologie. C’est dans ce milieu que l’on a débuté la prise en charge chirurgicale alors qu’il y a 30 ans, le traitement par immobilisation était la règle absolue. L’intervention est de plus en plus souvent choisie – dépendant des localisations de la fracture – car elle donne en général un résultat de meilleure qualité et un retour plus rapide à la pratique avec peu de complications.

Les traumatismes du genou

En apparence bénins, ils deviennent parfois un vrai problème s’ils touchent l’articulation fémoro-patellaire, à l’origine d’une contusion qui peut endommager le cartilage à ce niveau qui est la zone la plus sollicitée lors du pédalage.

Il est important de respecter un repos strict le temps que ces lésions guérissent, sous peine d’avoir à moyen ou long terme une réelle chondropathie empêchant la poursuite de la pratique. Évidemment le stade au-dessus est la fracture de la rotule, plus facilement diagnostiquée mais dont les suites sont toujours aléatoires.

Les traumatismes crâniens

Ces pathologies ne sont pas spécifiques du cyclisme mais sont bien sûr très fréquentes et deviennent, à l’instar de ce qui se fait dans d’autres sport comme le rugby et le foot, l’objet d’une meilleure évaluation afin de dépister les commotions cérébrales qui peuvent faire courir des risques aux coureurs s’ils poursuivent la compétition après une telle pathologie.

La commission médicale de la fédération a beaucoup travaillé sur ce sujet pour informer et protéger les coureurs. Il faut privilégier la protection des jeunes et éviter le deuxième impact qui peut donner des complications.

Les pathologies médicales liées à une pratique intensive

L’asthme d’effort

C’est une maladie qui n’est pas spécifique de la pratique cycliste car elle existe dans d’autres activités sportives, mais elle touche essentiellement les sports d’endurance, donc fréquemment le cycliste.

Ce problème concerne bien sûr les personnes souffrantes d’asthme de repos, mais aussi à la longue certains cyclistes qui en sont exempts initialement mais qui vont voir survenir après un certain nombre d’années de pratique des signes évocateurs. On parle alors de « bronchoconstriction induite par l’exercice » car le phénomène en cause est une inflammation des bronches liée à cette pratique intensive entraînant une diminution du calibre des bronches comme dans l’asthme.

Le diagnostic est parfois difficile car le mode de survenue est très insidieux et la présence des signes, intermittente. Cela peut s’exprimer par des sifflements caractéristiques mais aussi par de la toux après l’effort ou simplement par une baisse inexpliquée des performances. Le traitement repose sur les médicaments habituels de l’asthme en spray, qui n’ont aucun effet dopant mais permettent juste aux sujets atteints de revenir à leur niveau respiratoire normal.

L’endofibrose artérielle

C’est une pathologie assez spécifique du cycliste, touchant en particulier l’artère iliaque externe, même si elle a été décrite dans d’autres sports, mais plus rarement. Il se créé un allongement et/ou un épaississement d’une partie de cette artère liée au frottement et à l’étirement répétés lors du mouvement de pédalage, entraînant alors une baisse progressive de la lumière du vaisseau (endofibrose) et donc un manque d’apport en sang et en oxygène du muscle à l’effort.

La symptomatologie est une baisse de force du ou des membres inferieurs à l’effort avec une sensation de crampes. Elle touche essentiellement les cyclistes de haut niveau ou amateurs confirmés ayant fait de nombreux kilomètres. Le traitement est exclusivement chirurgical.

Les pathologies digestives

Les cyclistes, en particulier sur route, ont souvent des troubles digestifs, liés à divers facteurs : une position allongée vers l’avant sur leurs machines entraînant une compression de l’abdomen, des besoins alimentaires fréquents et riches en sucres rapides – au vu de leur dépense énergétique importante – au pouvoir oxydatif important, délétère pour la muqueuse et une ischémie à l’effort liée à une baisse de perfusion des viscères durant les efforts prolongés.

Cette diminution du flux sanguin s’explique par une redistribution du volume sanguin en cas de déshydratation qui va préférentiellement vers les organes nobles et les muscles. Les conséquences sont des troubles digestifs divers, intolérance alimentaire et dysbiose – déséquilibre de la flore digestive.

Des apports alimentaires spécifiques et l’utilisation de probiotiques sont recommandés. Les quelques exemples évoqués ci-dessus montrent que la pratique cycliste a des pathologies spécifiques ou préférentielles. Il est important de les connaître pour les dépister et les diagnostiquer.

En prévention, il importe de respecter des réglages de la machine adaptés à la morphologie du cycliste et d’effectuer une pratique progressive et raisonnée. Il n’y aura alors que peu de risque de voir apparaître des pathologies, et le vélo pourra alors conserver une de ses fonctions principales : être un outil de santé.