Nos conseils pour pratiquer le triathlon en cas de pathologie chronique associée

Conseils pour pratiquer le triathlon en cas de pathologie chronique associée
Conseils pour pratiquer le triathlon en cas de pathologie chronique associée

Par Anne-Charlotte Dupont, membre de la Commission Nationale Médicale de la Fédération Française de Triathlon. Avec la participation d’Olivier Coste, membre de la Commission Nationale Médicale de la Fédération Française de Triathlon.

Le « sport-santé » est aujourd’hui un axe de développement fort de la Fédération française de triathlon. Cette notion recouvre la pratique d’activités physiques ou sportives qui contribuent au bien-être et à la santé du pratiquant, sur les plans physique, psychologique et social, conformément à la définition de la santé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS, 1946). Au-delà de cette définition habituelle de la santé, la pratique régulière, raisonnée et réfléchie doit permettre d’acquérir les capacités pour faire face aux divers facteurs environnementaux et obtenir une qualité de vie satisfaisante au quotidien.

Dans le cas des maladies chroniques (cancer, diabète, maladies respiratoires…), l’activité physique est même considérée comme une thérapeutique ou une intervention non médicamenteuse, dont les effets peuvent être comparables voire supérieurs à certains médicaments. Le décret paru le 30 décembre 2016 a permis de consacrer cette réalité en favorisant la prescription médicale d’activité physique adaptée chez les patients concernés par une affection de longue durée (ALD). Nous vous proposons ainsi un petit tour d’horizon des grandes pathologies pour lesquelles la pratique physique est favorable en appréciant les adaptations à mettre en place lorsqu’on souhaite pratiquer le triathlon dans ce contexte.

L’examen médical, un réflexe à adopter

D’une façon globale, il est conseillé de s’adresser à son médecin traitant pour réaliser un bilan médical de reprise de l’activité physique et sportive, avec notamment un examen ostéo-articulaire et musculaire, sans oublier une évaluation cardio-vasculaire. Une fois ce bilan validé, le pratiquant doit garder en tête quelques règles de bonne pratique :

  • toujours s’astreindre à un échauffement progressif d’ordre musculaire et articulaire d’une dizaine de minutes avant de commencer sa séance;
  • progressivité de la séance qui sera adaptée aux conditions environnementales et à l’état de forme du jour ;
  • et observer une période de retour au calme de cinq à dix minutes en fin d’entraînement.

D’autre part, il est important pour les novices ou les personnes ayant arrêté toute activité depuis un certain temps de faire une reprise graduelle en limitant l’intensité et la durée des séances et en les espaçant de plusieurs jours au démarrage. Ainsi, il faut savoir s’écouter et accepter qu’il « vaut mieux une séance de moins qu’une séance de trop ».

Les lombalgies, restez en mouvement

Commençons par les lombalgies, terme global désignant « une douleur siégeant au niveau du rachis lombaire ». Pour que leur prise en charge soit efficace, il faut en connaître la cause – lombalgie commune chronique, arthrose, etc. – de manière à choisir l’activité physique la plus adaptée, et toujours veiller à pratiquer selon la règle de l’indolence.

Globalement, la pratique d’une activité physique régulière adaptée aux lombalgies doit associer des activités d’endurance, c’est-à-dire associant un exercice d’intensité modérée à une durée suffisamment longue, à des activités de renforcement musculaire, notamment des muscles paravertébraux de la région lombaire.

À cela peut s’ajouter un travail de stabilisation-proprioception – comprendre « apprendre à contrôler la position de son corps dans l’espace » – et de mobilité-souplesse. Enfin, une pratique en groupe avec des personnes qui affichent les mêmes objectifs ne fait qu’améliorer l’implication de la personne. Mais gardons à l’esprit que l’activité physique doit être choisie parmi un panel de sports préconisé, et non être imposée par un professionnel de la santé car « le bon traitement, c’est le mouvement » (campagne de l’Assurance Maladie).

De loin, l’activité la plus recommandée est probablement la natation, qui fait partie des sports portés, donc qui permet de s’affranchir du poids du corps supporté par les membres inférieurs et le rachis lombo-sacré. Un sport complet qui offre une prise en charge globale des grands axes suscités.

Le choix de la nage se fera selon la tolérance du pratiquant, sans oublier que quelques conseils ou cours peuvent améliorer la pratique à visée sport-santé. Le vélo peut également être adapté en tant que sport porté, à condition que la station assise soit bien tolérée et surtout que le vélo soit bien réglé. Demandez conseil auprès d’un vélociste.

La pratique du vélo permet d’allier une activité d’endurance menée dans la durée à une activité travaillant la coordination mais aussi le renforcement musculaire en fonction de la topographie du chemin emprunté. Pratiqué sur route ou sur chemin, le vélo permet une certaine forme d’évasion du corps et de l’esprit.

Attention à toujours porter un casque, même lors d’une balade dominicale, un accident est vite arrivé ! Concernant la course à pied, sa pratique n’est pas formellement contre-indiquée en cas de lombalgie commune et doit être adaptée en fonction de la tolérance : bon choix du chaussage, terrains souples mais pensez à ne pas courir uniquement sur la piste à chaque sortie.

La marche peut aussi être une bonne activité, qui reprend les principaux axes de pratique énoncés ci-dessus. Même si elle ne fait pas partie des sports portés. L’aquarunning est une autre solution en ce sens, pour celles et ceux qui ont la possibilité d’habiter près des côtes littorales et qui ne craignent ni le froid ni les vagues ! Bien entendu, pour une pratique visant à améliorer l’endurance, il faut marcher suffisamment vite, de manière à « pouvoir parler mais pas chanter ».

Réparation cartilagineuse par l’activité physique

L’arthrose est « une pathologie chronique dégénérative non inflammatoire du cartilage », qui peut affecter les adultes jeunes comme les personnes plus âgées. Les arthroses du genou et de la hanche restent les plus invalidantes au quotidien, à cause des douleurs et de la limitation articulaire. Elles peuvent conduire à un remplacement prothétique. Il a été démontré que la stimulation mécanique liée à l’activité physique influe sur l’équilibre entre dégradation et réparation du cartilage. De plus, l’activité modérée et intermittente améliorerait la réparation cartilagineuse, a contrario de l’inactivité qui semble arthrogène.

Dans ce contexte, les activités physiques et sportives auront pour objectif de favoriser la mobilité articulaire et ses amplitudes en premier lieu. À cela s’ajoutera également un renforcement musculaire bien conduit afin de réduire les limitations fonctionnelles. On peut donc facilement recommander la pratique de la natation, qui est un sport en décharge et qui va dans ce cas soulager les articulations de la hanche et du genou.

Parallèlement, les courants d’eau brassés au cours de la séance ne font qu’améliorer la physiologie de l’articulation et ainsi lutter contre l’inflammation et les œdèmes. Attention néanmoins à limiter la pratique de la brasse lorsque l’arthrose atteint le compartiment articulaire entre la rotule et le fémur, par exemple ! Le cyclisme fait également partie des sports recommandés sauf en cas de dysplasie de rotule, par exemple pouvant rendre douloureux chaque mouvement.

La course à pied cependant nécessite une autorisation au cas par cas en fonction de l’atteinte articulaire identifiée, et peut être allègrement remplacée par la marche sur terrain plat ou encore le footing sur tapis roulant, moyennant une chaussure correctement choisie, c’est-à-dire sur les conseils d’un professionnel.

L’activité physique contre la tension artérielle

Poursuivons avec la pratique d’activité physique lorsqu’on est porteur d’une pathologie cardio-vasculaire. Mais de quoi parle-t-on au juste ? L’altération de l’état des artères est un processus physiologique et s’accélère avec l’âge. L’atteinte artérielle évolue donc depuis le plus jeune âge.

Elle est dépendante des facteurs de risque cardio-vasculaire tels que l’âge, le tabagisme, le diabète ou encore la sédentarité. Elle est longtemps asymptomatique et ne peut affecter que de façon spécifique certains organes cibles comme le cœur, le cerveau ou encore le rein, donnant lieu alors à différentes pathologies, de l’infarctus du myocarde à l’insuffisance rénale vasculaire.

Pour diminuer son risque cardio-vasculaire global, il faut donc protéger ses artères en luttant notamment contre les facteurs de risque modifiables. C’est pourquoi l’activité physique et sportive constitue une bonne option thérapeutique non médicamenteuse qui va permettre de baisser la tension artérielle, d’aider au sevrage tabagique ou encore de faciliter la perte de poids, en améliorant le profil lipidique et glucidique, et en minimisant un éventuel diabète en favorisant l’utilisation des glucides à l’effort.

Par conséquent, pour retarder le vieillissement des artères, rien ne vaut une activité physique d’intensité modérée et une pratique régulière, sans tomber dans les activités intenses ou de longue durée, recommandations que l’on peut tout à fait appliquer à la pratique loisir du triathlon dans sa globalité.

En cas de cardiopathie ischémique – comprendre infarctus du myocarde traité ou angine de poitrine chronique (« angor ») – il faut éviter les épisodes d’ischémie coronaire entraînant un risque plus élevé de rupture de la plaque d’athérome et de mort subite. Les efforts intenses brutaux ou extrêmement longs sont donc à proscrire.

Il faut cependant garder en tête que les meilleures recommandations se font dans l’activité physique d’endurance à intensité modérée et à durée limitée, à savoir au maximum une heure par jour, au moins au décours d’un événement récent.

Cependant, après réadaptation cardiaque et sur avis du cardiologue, il est tout à fait envisageable de réaliser de temps à autre quelques petits pics d’intensité sans dépasser 85 % de la PMA obtenue lors du test d’effort et à la durée d’une minute. Bien entendu, toutes ces orientations sont à définir de façon claire et précise avec le cardiologue.

Diabète et asthme, quelques règles importantes

En quelques mots, intéressons-nous aux patients diabétiques et asthmatiques. Oui, il faut poursuivre la pratique d’une activité physique régulière et adaptée, selon les grands principes abordés ci-dessus… tout en sachant identifier les facteurs de risque imposés par ces deux pathologies.

Pour la personne diabétique, d’autant plus si elle est traitée par insuline, il faut redouter l’hypoglycémie en cours de pratique. Ce qui implique de réaliser un repas équilibré riche en glucides lents et de contrôler sa glycémie au moins avant le départ. De plus, toute sortie implique d’emporter avec soi une collation de sucre rapide ainsi que le kit d’urgence injectable, en cas d’hypoglycémie avec malaise voire perte de connaissance (« glucagon »).

De la même façon, la pratique sportive en cas d’hyperglycémie importante doit se faire sous contrôle glycémique rapproché et sous la vigilance de l’entraîneur ou du capitaine de route. Cependant, l’activité physique et sportive améliore une hyperglycémie modérée. Par conséquent, il est important pour les patients diabétiques d’avoir eu une éducation thérapeutique orientée à la pratique d’une activité physique adaptée chez le diabétique.

Pour la personne asthmatique, il va falloir tenir compte des conditions environnementales dans lesquelles elle pratique. C’est-à-dire qu’un environnement froid et sec est davantage susceptible de déclencher une crise d’asthme qu’un endroit chaud et humide. De plus, il faut éviter de pratiquer en condition de pollution atmosphérique qui est un facteur aggravant de l’hyperactivité bronchique.

Sur le plan sportif, il faut avoir en tête que la course à pied est plus pourvoyeuse de crise d’asthme d’effort que le cyclisme et que, en cas de doute, il vaut mieux pratiquer la marche qui semble limiter le déclenchement d’une crise. Dans tous les cas, il est vivement conseillé de prendre son traitement de fond de façon quotidienne et de toujours emporter avec soi un bêta-2-mimétique de courte durée d’action tel que le salbutamol, à prendre immédiatement en cas de symptomatologie évoquant une possible crise d’asthme.

Surpoids et obésité, de nombreux risques

Terminons avec le surpoids et l’obésité qui ne sont pas des pathologies chroniques en tant que telles, mais des facteurs de risque cardio-vasculaires. Ils correspondent à deux niveaux différents d’un excès de poids, exprimé par l’indice de masse corporelle (IMC), et peuvent aussi contribuer à la survenue de troubles métaboliques comme un excès de cholestérol, un diabète ou encore des pathologies musculo-squelettiques et ostéo-articulaires dont l’arthrose des articulations porteuses.

Pendant longtemps, il a été recommandé de pratiquer une activité physique d’endurance à une intensité faible et sur une longue durée, de manière à favoriser la lipolyse. Depuis quelques années seulement, il est également préconnisé d’effectuer des exercices intensifs courts de manière à favoriser en récupération l’utilisation des lipides, afin d’aider à la resynthèse glycogénique musculaire. De ce fait, la dépense énergétique de repos est augmentée et surtout prolongée dans le temps, ce qui favorise à terme la perte de poids.

Parallèlement, il est conseillé de pratiquer fréquemment, avec une préférence pour les séances dites « en aérobie de longue durée », voire tous les jours, pour que l’augmentation du métabolisme de repos soit soutenue et prolongée dans le temps.

Un accompagnement non médicamenteux

Pour conclure, la pratique d’une activité physique régulière et correctement conduite est vivement recommandée en cas de dispositif d’accompagnement non médicamenteux de pathologies chroniques avérées. La règle est de pratiquer selon l’indolence, de rester raisonnable et de savoir s’écouter.

Les recommandations sont les suivantes : pratiquer de manière régulière et progressive avec au moins trois séances par semaine espacées dans le temps, choisir une activité adaptée à ses limites, mais surtout à ses envies. De ce fait, le triathlon reste une activité complète et variée qui peut être pratiquée tant en intérieur qu’en extérieur, et qui ne présente pas de réelles contre-indications à la pratique de l’activité physique. Les restrictions seront donc définies en fonction du bilan médical et des pathologies associées qui ont été mises en évidence.

En principe, on peut envisager de reprendre une activité physique en débutant par la marche sur terrain plat, pour évoluer vers la course à pied si cela est possible. La natation reste une activité complète et recommandée notamment pour soulager les articulations des membres inférieurs, mais elle constitue parfois un frein lié au regard des autres pratiquants. Enfin, le vélo est l’activité aérobie par excellence pour réaliser des séances de longue durée, y compris dans sa version électriquement assistée, pour reprendre une activité physique en terrain vallonné.

Un bilan initial auprès d’un médecin est nécessaire et, en cas d’interrogation, il est bon de s’adresser à un médecin du sport, ou à un médecin formé à la prescription d’activité physique et sportive dans le cadre thérapeutique, pour préciser avec lui un cadre précis et sécuritaire avant l’entrée en club.

Rappelons également que, pour accueillir ces personnes, la Fédération française de triathlon a lancé en 2016 le « Coaching Triathlon Santé », permettant aux éducateurs formés de proposer au pratiquant un programme d’entraînement entièrement personnalisé, et adapté à son état de santé.