La chondrolyse, c’est la destruction rapide du cartilage. Elle peut provoquer une arthrose invalidante en quelques jours ! Elle survient chez le sportif enthousiaste qui impose trop de contraintes à ses articulations, notamment après une opération.
Le cartilage recouvre les os au niveau des articulations. Cette substance lisse possède des qualités mécaniques exceptionnelles en termes de roulement et de glissement. Malheureusement, ce tissu est fragile et peine à se réparer car il n’est pas vascularisé. Aussi est-il indispensable d’en prendre soin et de lui laisser le temps de s’adapter !
Dans les suites d’une intervention chirurgicale, les contraintes articulaires sont souvent modifiées. C’est tout particulièrement le cas après le retrait d’un fragment de ménisque fissuré. Pour mémoire, on en trouve deux dans chaque genou, l’un dans le compartiment externe, l’autre dans le compartiment interne.
LE CARTILAGE EST FRAGILE, IL N’EST PAS VASCULARISÉ
Cette structure souple se situe entre l’os de la cuisse et de la jambe. En forme de croissant, elle favorise l’emboîtement de la surface convexe du fémur avec le plateau du tibia. Elle joue un rôle essentiel de stabilisateur, d’amortisseur et de répartiteur de pression. Sa mission est encore plus importante en externe car les surfaces cartilagineuses sont encore moins congruentes.
À cet endroit, l’extrémité du tibia est légèrement bombée. Ainsi, les pressions sont énormes au point de contact entre les deux os.
LES MÉNISQUES SONT DES STABILISATEURS, DES AMORTISSEURS ET DES RÉPARTITEURS DE PRESSION
Vous comprenez que si votre chirurgien enlève une portion de ménisque les contraintes cartilagineuses soient décuplées ! Cette intervention appelée « méniscectomie partielle » n’est donc pas une formalité et la patience s’impose dans les semaines et les mois qui suivent. Investir du temps et programmer des contraintes mécaniques très progressives constituent des stratégies thérapeutiques indispensables.
APRÈS L’OPÉRATION, LE MÉNISQUE RÉSIDUEL DOIT SE MOULER ET LE CARTILAGE SE RENFORCER
En effet, dans ces conditions, le ménisque résiduel va peu à peu se mouler et combler partiellement l’espace laissé vacant par le fragment retiré. Parallèlement, le cartilage va s’adapter et devenir plus résistant dans les zones plus sollicitées.
Malheureusement, votre chirurgien est un expert 😊 ! Il est resté peu de temps dans votre genou, il a réalisé un geste rapide et précis sans autre agression au sein de votre articulation.
APRÈS L’INTERVENTION, VOUS ALLEZ « TROP BIEN »
En post-opératoire, vous n’avez pas très mal et vos muscles n’ont pas fondu. Dans les jours qui suivent, « vous allez trop bien » 😊! Vous vous sentez capable de reprendre vos activités rapidement… et vous brûlez les étapes !
Soyons clair et proposons des ordres de grandeur concrets ! Pas de course à pied avant 2 mois à l’issue de la régularisation d’un ménisque interne et pas avant 3 mois pour un ménisque externe ! Il faut alors attendre un mois supplémentaire pour les déplacements latéraux puis un autre pour retrouver son niveau et la compétition !
LA COURSE : 2 MOIS APRÈS UN MÉNISQUE INTERNE, 3 MOIS APRÈS UN MÉNISQUE EXTERNE
Évidemment, jusqu’à ces dates butoirs, vous pouvez garder la forme et le moral. Il est possible de pratiquer puis d’intensifier progressivement la natation, le vélo et ensuite l’elliptique ! Mais pas d’impact et pas de pivot ! Bien sûr, vous avez entendu des « histoires de chasse » mentionnant des retours à la compétition 2 à 3 semaines après ce type d’intervention ! C’est vrai ! Mais il s’agit de sportifs de très haut niveau souvent gênés par de tout petits fragments dont l’ablation perturbe peu la mécanique articulaire. Surtout, ces athlètes éclairés prennent le risque de la chondrolyse… pour jouer la finale du mois suivant, quitte à ne pas pouvoir trottiner avec leurs enfants dans 2 ans !
CONTRAINTES LOCALISÉES DANS UNE ARTICULATION ENCORE INADAPTÉE : DESTRUCTION RAPIDE DU CARTILAGE
Néanmoins, le plus souvent, si vous imposez d’importantes contraintes mécaniques à une articulation encore inadaptée, vous dégradez rapidement le cartilage ! Et vous ne pouvez pas vous fier à l’absence de douleur car le cartilage n’est pas innervé ! Vous le rabotez, vous en faites des copeaux sans avoir mal !
Seule la réaction inflammatoire de nettoyage devient gênante. Votre genou gonfle et chauffe… avec parfois quelques souffrances nocturnes ! Dans ce contexte, ces symptômes constituent une urgence médicale. Il faut absolument freiner l’autodestruction du cartilage initiée par le stress mécanique puis emballée par l’inflammation !
CHONDROLYSE = URGENCE
LAVAGE CHIRURGICAL, INFILTRATION, VISCOSUPPLÉMENTATION, PRP, COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES
Fréquemment, les chirurgiens prennent soin de réopérer. Ils lavent l’articulation et enlèvent les petits morceaux de cartilage qui flottent dans le liquide articulaire et entretiennent l’irritation biologique. Le repos et le glaçage sont indispensables. Il est aussi recommandé de faire une infiltration de corticoïdes et d’enchaîner avec des anti-inflammatoires par voie orale. Dans les semaines suivantes, l’injection de produits lubrifiants du type acide hyaluronique ou viscosupplémentation est conseillée pour tenter de rétablir un roulement, un glissement et un amortissement harmonieux. De même, plus tard, les PRP (pour « plasma riche en plaquettes ») sont souvent proposés pour essayer de régénérer un peu le cartilage. Toutes ces stratégies sont avantageusement accompagnées par la prescription de compléments alimentaires apportant les matières premières du cartilage : chondroïtine, glucosamine, silicium et collagène. Malheureusement, il persiste souvent des lésions à l’origine d’un inconfort sportif, voire de véritables séquelles fonctionnelles ! Alors, après chirurgie du ménisque : patience et progressivité !
Deux cas cliniques authentiques illustrent parfaitement ce phénomène. Jacques a 43 ans. Il court 2 fois par semaine et fait un peu de foot avec ses copains le dimanche. En pleine tran-sition professionnelle et personnelle, il a besoin de se fixer un challenge motivant ! Une broutille : l’UTMB ou « Ultra-trail du Mont-Blanc », à savoir 180 kilomètres de course dans la montagne accompagnés de 10 000 mètres de dénivelé positif. Il souffre déjà un peu de son ménisque interne, légèrement fissuré, mais cette situation est très fréquente chez le quadra sportif. Il engrange les kilomètres et le relief pendant 3 mois. Son genou siffle un peu après les grosses séances. Il n’est pas très inquiet.
Au cours de sa compétition, les douleurs s’installent à mi-parcours et le genou gonfle ! Qu’importe, il faut finir ! Il franchit la ligne en boitant après 47 heures de crapahut. À son retour, l’IRM montre un compartiment interne du genou « en feu » ! L’articulation est très gonflée ; le cartilage a pratiquement disparu, l’os sous-jacent est très œdémateux et surtout le ménisque est expulsé de l’articulation. À force de compressions et de cisaillements, les fibres d’amarrage de son ménisque ont lâché. Ce dernier a été exclu de l’articulation à la manière d’un noyau que vous auriez pincé entre vos doigts… Il a pratiqué tout seul, sans chirurgien, une ablation de son ménisque dans la montagne ! Et il a enchaîné avec une chondrolyse massive ! La prise en charge experte et urgente n’a pas fait de miracle ! Jacques a désormais une prothèse !
LA CHONDROLYSE PENDANT LE SPORT RESSEMBLE À UNE VIOLENTE POUSSÉE D’ARTHROSE
Didier a 62 ans. Il a déjà un peu d’arthrose dans son compartiment interne. Heureusement, il fait du triathlon, un sport croisé où la natation et le vélo ménagent son genou. Cependant, cette année, il souhaite viser le semi-marathon de Paris. Il enclenche un programme d’entraînement plus orienté course à pied. Aidé d’un cardio affûté grâce à sa préparation variée, il se sent très bien sur le parcours. Et, malgré quelques douleurs, il envoie très fort sur les derniers kilomètres. Le soir, son genou gonfle, durant la nuit il devient très douloureux et au matin il m’appelle en urgence. Là encore, l’IRM montre un genou très inflammatoire et un cartilage en cours de destruction. Cette fois, le tableau de
« chondrolyse rapide » ressemble à ce qu’on appelle aussi une violente « poussée d’arthrose ». Pour Didier, infiltration, viscosupplémentation et PRP s’enchaînent rapidement et évitent le drame ! Il peut aujourd’hui continuer le triathlon mais il a renoncé au Half Ironman et se contente désormais du Médium où la course n’est que de 10 kilomètres… Il se contente de courir tranquillement et réalise ses séances longues ou intenses à vélo ! Et, bien évidemment, il a supprimé de son agenda tous les objectifs de performance en compétition de course à pied !
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