Vous êtes sportif. Vous savez qu’il faut manger des sucres lents. De fait, l’index glycémique vous aide dans vos choix alimentaires. Malheureusement, il semble que les recherches récentes remettent en cause sa pertinence. Et si vos stratégies nutritionnelles étaient inadaptées ?
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Dans cet article, nous aborderons les thèmes suivants:
L’index glycémique mesure la vitesse d’assimilation du glucose contenu dans vos aliments. Lorsque vous mangez un glucide, la concentration en glucose dans le sang s’élève.
Ainsi, il est possible de faire une courbe. Il suffit alors de mettre la « glycémie » sur la droite verticale et le « temps » sur la droite horizontale. L’index glycémique correspond à la surface sous la courbe.
Si le glucose passe très vite dans sang, la glycémie monte haut et rapidement. Le débit de glucose en provenance du tube digestif est fort. Du coup, les cellules ne parviennent pas à l’absorber aussi vite. L’aire sous la courbe est importante. L’index glycémique est élevé, c’est donc un sucre rapide. Le glucose constitue la référence, son index glycémique est de 100.
Par contre, lors d’une digestion lente de l’aliment, le glucose passe peu à peu dans le sang. L’organisme à la possibilité de le faire entrer au fur et à mesure dans les cellules. La glycémie ne monte que modérément. L’aire sous la courbe est faible, l’index glycémique est bas, c’est un sucre lent. Les lentilles sont des sucres lents typiques. Leur index glycémique est de 40.Manger des sucres lents, oui. Mais pas n’importe comment!
Si le glucose passe lentement dans le sang, vos muscles parviennent à l’absorber. Ainsi, ils stockent ses maillons glucidiques sous forme de grandes chaines aux ramifications multiples : le glycogène.
Cette réserve d’énergie est considérée comme le carburant privilégié de l’effort sportif. En effet, contrairement aux graisses, les sucres peuvent brûler sans oxygène. Ils sont donc utilisables alors que vous êtes essoufflé. On parle de « glycolyse anaérobie ». De surcroît, ils sont indispensables à la combustion des lipides.
Une petite explication vous permettra de briller lors des dîners en ville entre sportif. Le glucose peut se couper en deux et se transformer en oxaloacétate. Cette molécule se comporte alors comme un catalyseur du cycle de Krebs, une succession de réactions chimiques intracellulaire achevant le fractionnement du glucose et des acides gras. Ce phénomène constitue la justification théorique du « mur du marathon ».
Souvent, ce dernier survient au voisinage du trentième kilomètre. Alors que le coureur se sent bien, en quelques centaines de mètres, ses muscles durcissent et deviennent très douloureux. Il est alors contraint de ralentir et souvent de marcher. Une vraie panne d’essence sur l’autoroute. On accuse alors l’épuisement des réserves de glycogène … associée à l’impossibilité de switcher sur la combustion des acides gras.
Aussi, on recommande de faire un gros stock de glycogène pour encaisser les charges d’entraînement élevées et les compétitions. C’est pourquoi le sportif est invité à manger des sucres lents, à index glycémique bas.
Quand vous ingérez des sucres rapides, le glucose passe très vite dans le sang. Les capacités d’absorption de vos muscles sont alors dépassées. Le surplus est transformé en graisses et stocké dans les cellules adipeuses.
Malheureusement, vous l’avez compris, ces réserves ne peuvent pas être brûlées lors des efforts intenses et sont inutilisables en l’absence de glucides. De surcroît, ce processus mène insidieusement à une prise de poids altérant la performance. Bref, le sportif doit éviter des glucides rapides !
Le fructose, comme son nom l’indique est très présent dans les fruits. Voilà qui lui donne d’emblée bonne réputation!
Lorsque je me suis spécialisé en nutrition du sportif, le fructose était considéré comme un sucre magique avec un index glycémique bas! En effet, cette petite molécule ressemblait au glucose mais bénéficiait d’un pouvoir sucrant 30% supérieur. On pouvait donc adoucir ses desserts et ses boissons en réduisant la facture calorique.
Surtout, son index glycémique était incroyablement bas, égale à 20! Cinq fois plus faible que le glucose, 3 fois plus faible que les légumineuses!
Après ingestion de fructose, les scientifiques constataient alors une très lente et très légère augmentation de la glycémie. L’explication était la suivante. Le fructose absorbé par l’intestin passe dans les veines qui mènent directement au foie. On parle alors de réseau portal. Dans cet organe, il devait être transformé en glucose avant de gagner la circulation sanguine principale. Les réactions chimiques étaient relativement lentes et la glycémie s’élevait très progressivement. Au fur et à mesure que le glucose arrivait, les muscles le captaient puisque leurs métabolismes n’étaient pas saturés. Le fructose permettait donc de stocker un maximum de glycogène.
On le disait fortement « glycopéxiant ». Pour les mêmes raisons, il se transformait très peu en graisse ! C’était vraiment le sucre idéal pour les sportifs ! On le conseillait même aux diabétiques !
Dès à présent, une remarque s’impose. Le sucre que vous mettez habituellement dans votre café ou dans votre yaourt porte le nom de saccharose. Il est constitué de deux maillons de glucide : le glucose et le fructose. Bien qu’il ait toujours eu mauvaise réputation pour la santé, son index glycémique n’est pas dramatique, loin de là ! Il est de 60, comme les pâtes complètes al dente ! Rien d’illogique puisqu’ il s’agit de la moyenne entre le glucose coté à 100 et le fructose coté à 20. Mais les médecins de l’époque faisaient aisément le grand écart intellectuel, ils mettaient l’index glycémique bas du saccharose sous le tapis et suggéraient d’en limiter la consommation. Parallèlement, ils vantaient les mérites du fructose !Sportifs: ne buvez plus les fruits, mangez-les! Avec modération
La révélation nous est venue de l’agroalimentaire américaine, de son interprétation épidémiologique et scientifique ! En effet, les politiques d’outre atlantique souhaitaient gagner en indépendance vis-à-vis du vieux continent. Il fallait donc réduire l’importation de sucre provenant des betteraves européennes. Les chimistes ont alors travaillé et sont parvenus à industrialiser le fractionnement de l’amidon.
Pour mémoire, ce dernier est constitué de longues chaines de glucoses ramifiés. Il ressemble ainsi au glycogène, il est juste un peu moins dense.
L’amidon est la réserve en sucre des plantes ; le glycogène est la réserve en sucre des animaux.
Aux USA, les immenses champs de maïs ont été utilisés pour produire de la farine, de l’amidon et du glucose. Mieux encore, les scientifiques sont parvenus à décupler l’action d’une enzyme appelée « isomérase ». Cette dernière transforme le glucose en fructose au pouvoir sucrant encore supérieur !
Ainsi, glucose et fructose ont envahi l’alimentation des américains et on a vu flamber l’obésité ! Plus intriguant, plus inquiétant, des maladies du foie quasi-inconnues ont fait leur apparition. Il s’agit des cirrhoses non alcooliques.
Dans ces circonstances, le toxique qui fait dégénérer le foie n’est pas l’alcool mais le fructose ! L’agression commence par une accumulation de graisse dans les cellules hépatiques, on parle de « stéatose hépatique ». Souvenez-vous ! Ce sucre magique qui ne fait pas monter la glycémie ! On a enfin trouvé pourquoi ! Ce n’est pas parce qu’il devient très lentement du glucose … mais parce qu’il se transforme massivement en graisse dans le foie !
Theodosius Dobzhansky, chercheur en biologie soviétique, a dit « Rien en biologie n’a de sens sinon à la lumière de l’évolution ». Alors Darwin peut nous aider à interpréter ce phénomène !
En effet, au paléolithique, les hivers étaient source de disette. Ainsi, les fruits de l’été devaient permettre un stockage maximum d’énergie assurant la survie à l’arrivée des grands froids. Voilà donc pourquoi cette transformation urgente du fructose en acides gras a été sélectionnée au fil des millénaires. C’était donc à la préhistoire que le fructose fût un sucre magique ! Pas au 21ème siècle !
Désormais, en occident, l’abondance alimentaire est de mise tout au long de l’année. Les fruits traversent la planète en bateau ou en avion et se moquent des saisons ! Pire encore, le fructose provient désormais de la farine ! L’espèce humaine en ingère dans des proportions imaginables pour Dame Nature ! En effet, il est artificiellement présent dans les friandises, dans les sodas et dans de nombreux produits transformés. Sur les étiquettes, parmi les ingrédients, il se cache sous de nombreuses appellations : sirop de glucose fructose, sirop de glucose à haute teneur en fructose, isoglucose, sucre inverti, amidon modifié, dextrose, etc. Soyez donc vigilants, lisez ! C’est écrit petit !
>> Sachant cela, il devient intéressant de lire notre article « Maigrir malgré le sport« !
Le PNNS ou « Plan National Nutrition Santé » nous assène quotidiennement ses recommandations : « Mangez au moins 5 fruits et légumes par jour ». Ce slogan n’évoque aucune limite supérieure. Il est politiquement correct de les promouvoir sans retenue ! Pourtant le fructose est le sucre principal des fruits ! Sans compter qu’ils contiennent aussi beaucoup de glucose et de saccharose, des glucides intrinsèquement rapides ! Alors dans ce contexte la prudence s’impose quitte à transgresser les dogmes en vigueurs ! Surtout quand l’Homme a une nouvelle fois massivement opté pour la transformation !
La transformation en jus de fruits ! Étonnamment, le site internet dévolu au PNNS, « mangerbouger.fr », n’hésite pas à promouvoir les jus de fruits comme une alternative cohérente à l’ingestion de fruits entiers. A contrario, Robert LUSTIG s’insurge contre cette confusion. Il est un endocrinologue aux Etats-Unis. Dans son livre, « Le sucre : l’amère vérité », il nous fait part de son expérience en médecine de l’obésité et raconte une consultation typique.
Ainsi, il reçoit un bambin atteint d’une adiposité morbide. Il dit alors à sa maman : « Ne me dites pas ce qu’il mange, dites moi ce qu’il boit ». Sa mère semblant se défendre, rétorque : « Il n’y a pas de soda à la maison, il ne boit que des jus de fruits ! ». Riche de son background et des informations provenant des études récentes, le praticien répond alors : « C’est la même chose ! ».
Et, il a raison ! Un litre de Coca, c’est 110 grammes de sucres. Un litre de jus de raisin, c’est 140 grammes ! 30 grammes de plus que le soda le plus célèbre du monde ! Le jus d’orange avec ses 110 grammes par litre est à égalité. Bien sûr, les jus de fruits contiennent des vitamines et des minéraux. Contrairement aux sodas, ce ne sont pas des calories vides ! Mais concernant la décharge de sucre dans la circulation sanguine, ils sont tout aussi toxiques !
La consistance liquide est à l’origine d’une digestion ultra-rapide inconnue de nos ancêtres. Ces vagues glucidiques noient les régulations métaboliques. Les processus de mis en réserve du glycogène sont dépassés, les sucres sont inévitablement transformés en graisse et stockés dans la foulée !
Que le jus soit industriel ou fait maison ne change rien ! Les smoothies sont à peine moins délétères ! Bien sûr, ils contiennent les fibres des fruits mais ces dernières sont tellement écrasées qu’elles ne gênent pas la digestion. Jus de fruit et smoothies ont deux inconvénients identiques et majeurs : leur ingestion est rapide et souvent en quantité très importante ! Un verre de jus d’orange, c’est trois oranges. Qui boit un verre de jus d’orange le matin ? Qui prend le temps de manger trois oranges au petit déjeuner ? Et qui en aurait l’idée ? La mesure de l’index glycémique permet d’en savoir plus à l’instant T.
Des fibres pour limiter l’index glycémique!
Heureusement les fruits entiers ont une structure particulière: un squelette cellulosique inassimilable. La nature a bien fait les choses. De nombreux avantages en résultent pour ralentir la digestion.
Souvent, il est nécessaire de les peler et les couper. Chaque fois, il faut les mastiquer. Dans le tube digestif, les fibres gênent en effet l’accès des enzymes et perturbent le contact avec les parois de l’intestin où se produit l’absorption. De surcroît, la tradition place les fruits en fin de repas, au-dessus du bol alimentaire. Tous ces facteurs contribuent donc à ralentir la digestion des sucres présents dans les fruits. Ils passent progressivement dans le sang. Les muscles et le foie ont alors le temps de les faire pénétrer dans leurs cellules et d’en faire du glycogène, une longue chaîne de glucose aisément disponible pour l’effort.
Alors que faire en pratique quand on est sportif ? Ne vous fiez plus à l’index glycémique lorsqu’il s’agit de définir la lenteur d’un glucide au goût sucré. Le fructose, son index de 20 et sa propension à se transformer en acides gras ont en effet bouleversé la donne et faussé toutes interprétations. Arrêtez de boire des fruits ! Mangez-en ! Et encore en quantité raisonnable ! Désormais vous le savez, le sucre des jus de fruits se comporte comme celui des sodas ! Si vous faites du sport à dose santé, zappez le rayon concerné de votre supermarché.
Vous pouvez même videz vos placards et votre frigo. Si vous pratiquez des disciplines d’endurance, vous bénéficiez d’une petite dérogation. En effet, les jus de fruits vous permettent de vous préparer une boisson de l’effort saine et naturelle ! Dans ces circonstances, la vitesse d’absorption des sucres contenus constitue alors un avantage ! Optez plutôt pour le jus de pomme ou le jus de raisin. Les jus d’agrumes contiennent du sorbitol, un accélérateur du transit, souvent responsable de diarrhée à l’exercice. Encore faut-il les diluer !
En effet, quand la boisson présente dans le tube digestif est plus concentrée que le sang, elle crée un appel d’eau en provenance de la circulation. Elle réduit d’autant son volume et créer ainsi une déshydratation relative ; un comble pour une boisson ! Le contenu intestinal augmente, provoquant alors rapidement inconfort et douleur, surtout en course à pied.
Par temps clément, mettez entre 1/4 et 1/8 de jus de fruits et le reste d’eau. N’oubliez pas d’ajouter une pincée de sel.
En dehors de ces circonstances, mangez des fruits ! Évitez également les collations exclusivement fruitées, le passage du sucre est trop rapide ! Vous risquez d’être victime de la fameuse « hypoglycémie réactionnelle » responsable d’une fringale en rebond. Préférez les fruits en fin de repas. Mélangés au contenu de l’estomac, ils passeront ainsi plus lentement. Enfin, restez raisonnable dans les quantités ! Bien qu’aucune recommandation nutritionnelle n’existe, on peut imaginer qu’une portion de 1 à 2 fruits au petit déjeuner, au déjeuner, à la collation et le soir constitue alors un maximum !
Notez néanmoins que ce concept est désormais mis à mal par les méthodes d’entraînement préparant aux très longues distances. A ce sujet, n’hésitez pas à lire l’article: « Boostez votre sortie à jeun ».
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