Plasma Riche en Plaquettes: une colle biologique pour vos blessures

Plasma Riche en Plaquettes: une colle biologique pour vos blessures
Plasma Riche en Plaquettes: une colle biologique pour vos blessures

Le PRP ou plasma riche en plaquettes est de plus en plus utilisé pour traiter les lésions de l’appareil locomoteur du sportif. De quoi s’agit-il exactement ? Comment ça marche ? Quelles sont les meilleures indications ? Et surtout, à quelles autres stratégies thérapeutiques l’associer pour plus d’efficacité ?

Les plaquettes sont de minuscules fragments de cellules qui circulent dans notre sang. Elles s’agglutinent sur la paroi des vaisseaux sanguins abîmés en cas de plaie, d’entorse ligamentaire ou de claquage musculaire. Pour décrire ce processus cellulaire, on parle d’« agrégation plaquettaire ». Cette dernière s’associe à un phénomène moléculaire appelé « coagulation » au cours duquel bon nombre de protéines du sang se rigidifient et s’enchevêtrent.

Agrégation plaquettaire et coagulation agissent en synergie pour former un caillot et stopper l’hémorragie. Le rôle des plaquettes ne s’arrête pas là. Elles sont pleines de facteurs de croissance qui se déversent au cœur de la lésion. Ces éléments stimulent les cellules au voisinage de la blessure afin qu’elles se multiplient et réparent les tissus environnants.

Pour pallier l’urgence, les fibroblastes sont mis à contribution. Comme leur nom l’indique, ils sont à l’origine d’un tissu fibreux qui colmate bien la plaie mais ne restaure pas parfaitement les caractéristiques mécaniques initiales de la zone traumatisée. Les sportifs connaissent bien ce phénomène car ils sont souvent gênés par des cicatrices trop rigides et manquant d’élasticité.

Parmi les molécules présentes dans les plaquettes, on trouve également des substances qui attirent les cellules souches. Chez l’adulte, ces dernières sont mises en réserve dans la moelle osseuse essentiellement au niveau du bassin. Un peu comme des cellules d’embryon, elles sont capables de se programmer pour reconstituer n’importe quel tissu, en fonction des messages de l’environnement biologique qui les accueille.

Grâce à leur participation, le tissu de cicatrisation gagne en spécificité. La plaie cutanée redevient une peau normale et ne donne pas lieu à une balafre épaisse et rétractée. Il en va de même pour un ligament, un tendon ou un os qui retrouvent les qualités mécaniques nécessaires au bon fonctionnement de l’appareil locomoteur.  

Un Plasma Riche en Plaquettes, qu’est-ce que c’est ?

Vous le savez, PRP signifie « plasma riche en plaquettes ». Pour l’obtenir, votre médecin vous fait une prise de sang ; il prélève un plus grand tube que pour un examen biologique traditionnel. Le récipient est placé dans une centrifugeuse. De cette manière, les éléments du sang s’échelonnent en fonction de leur poids.

Le kit permet de récupérer la hauteur correspondant aux plaquettes. Sous échographie ou sous radiographie, votre thérapeute les injecte à l’endroit de la lésion. Il peut s’agir de la cavité articulaire en cas d’arthrose ou d’une fissure si vous souffrez d’un ménisque usé, d’une tendinite ou d’une entorse.

LE PLASMA RICHE EN PLAQUETTES FORME COMME UN CLOU TISSULAIRE AU CŒUR DE LA LÉSION

En effet, le Plasma Riche en Plaquettes forme comme un clou tissulaire qui vient combler le vide laissé au niveau de votre blessure. Les plaquettes s’agglutinent et rétablissent la continuité. Les protéines qu’elles libèrent stimulent les cellules avoisinantes, essentiellement les fibrocytes. Ces derniers produisent des fibres de collagène qui font un pont solide entre les berges de la lésion. Les plaquettes attirent aussi les cellules souches qui vont se différencier afin de reconstituer le tissu d’origine apte à assumer les contraintes mécaniques spécifiques. 

Quelles sont les indications du Plasma Riche en Plaquettes ?

Quelles sont les indications du Plasma Riche en Plaquettes ?
Quelles sont les indications du Plasma Riche en Plaquettes ?

Un tendon est une cordelette fibreuse reliant un os et un muscle. Il transmet la force de contraction pour mobiliser une articulation. Une souffrance de cette structure porte le nom de « tendinite » ou plus exactement de « tendinopathie ». Le ligament, lui, relie un os à un autre os en passant par-dessus une articulation dont il contrôle le mouvement. Sa lésion s’appelle une « entorse ». Le premier est plus rigide que le second, mais leur composition moléculaire et leur organisation tissulaire sont voisines. Lorsqu’ils se fissurent ou se déchirent partiellement, le Plasma Riche en Plaquettes permet souvent d’optimiser la cicatrisation. Disons-le d’emblée, la blessure récente ne constitue pas une indication idéale. En effet, dans ces circonstances, la blessure vient de saigner et la nature vous a apporté son Plasma Riche en Plaquettes naturel, à savoir une hémorragie riche en plaquettes.

LA BLESSURE RÉCENTE N’EST PAS L’INDICATION IDÉALE DU PLASMA RICHE EN PLAQUETTES

Dans le même ordre d’idée, vous savez que les muscles présentent une couleur rouge car ils sont traversés de nombreux vaisseaux sanguins qui leur apportent l’oxygène et l’énergie nécessaires à la contraction. De fait, vous comprenez pourquoi les claquages saignent abondamment. Et vous en déduisez que le Plasma Riche en Plaquettes se montre sans grand intérêt sur ce type de lésion.

À contrario, un ligament et surtout un tendon représentent des cordelettes blanches faiblement vascularisées. Les lésions saignent peu et le Plasma Riche en Plaquettes se révèle souvent efficace notamment longtemps après le traumatisme quand la cicatrisation s’essouffle un peu. Dans ces conditions, le Plasma Riche en Plaquettes apporte bien plus de plaquettes que la blessure initiale. 

De surcroît, tout se passe comme si le Plasma Riche en Plaquettes réenclenchait localement les conditions d’une lésion récente avec invasion de fibroblastes et surtout de cellules souches. Les processus de réparation sont abondamment réactivés et mènent fréquemment à la guérison après une à trois injections.

LE PLASMA RICHE EN PLAQUETTES RELANCE UN PROCESSUS DE CICATRISATION QUI S’ESSOUFFLE

Les tendons d’Achille, le tendon rotulien, celui de l’épaule ou celui du coude font partie des indications les plus fréquentes. Les études mentionnent une efficacité variable. Ces résultats s’expliquent par des kit différents contenant plus ou moins de plaquettes, des opérateurs plus ou moins expérimentés, des protocoles de rééducation et des programmes de reprise sportive hétérogènes et parfois insuffisants !

Mon expérience est bien plus optimiste. J’obtiens même d’excellents résultats dans la cicatrisation du ligament croisé antérieur, alors que cette blessure traîne l’image d’une indication chirurgicale formelle ! (Voir l’article « Entorse du ligament croisé : un nouveau traitement »).

Afin de maximiser les chances d’accolement des deux portions ligamentaires, il est possible d’utiliser un kit contenant à la fois du Plasma Riche en Plaquettes et de la thrombine. Cette dernière est une molécule essentielle à la coagulation, le phénomène moléculaire qui arrête le saignement et forme le premier réseau microscopique reliant les berges de la lésion. Vous l’avez lu, ce processus s’inscrit en complémentarité biologique avec l’agrégation plaquettaire que l’on peut qualifier de phénomène cellulaire lui aussi à l’origine du caillot.

Les patients de plus de 40 ans victimes d’une usure du ménisque sont également rapidement soulagés grâce à l’injection d’un Plasma Riche en Plaquettes dans la fissure horizontale qui caractérise cette lésion. Cette zone se situe en périphérie méniscale et ne ressemble pas du tout à la fracture verticale du ménisque retrouvée chez le jeune sportif pratiquant une discipline avec changements de direction. Ce traumatisme ne constitue pas une bonne indication du Plasma Riche en Plaquettes car la lésion se trouve trop loin des vaisseaux et ne peut pas cicatriser. 

Vous le savez, l’arthrose, c’est l’usure du cartilage, une substance lisse qui recouvre les os au niveau des articulations. Ce tissu cicatrise très difficilement car les cellules ne se multiplient pas ! C’est dans cette optique que le Plasma Riche en Plaquettes peut contribuer à une modeste reconstitution du cartilage. Il est probable qu’un tissu fibreux comble une partie des irrégularités et il est possible que quelques cellules souches attirées sur les lieux deviennent des « chondrocytes », nom scientifique donné à des cellules de cartilage. Il est également probable que, en relançant un processus de cicatrisation plus harmonieux, le Plasma Riche en Plaquettes apaise l’emballement inflammatoire qui caractérise la poussée d’arthrose. Dans cette indication, je l’utilise souvent en remplacement d’une infiltration d’anti-inflammatoires stéroïdiens, les fameux corticoïdes.  

Vous connaissez peut-être la « viscosupplémentation ». Il s’agit de l’injection intra-articulaire d’une substance huileuse et amortissante. Ce produit visqueux ressemble à la synovie naturelle qui lubrifie votre articulation. Cependant, il existe une différence intéressante : les molécules sont beaucoup plus grosses. Ainsi, leurs propriétés de roulement et de glissement sont nettement améliorées au grand bénéfice de votre mobilité articulaire. Ce geste thérapeutique peut être aisément associé au Plasma Riche en Plaquettes grâce à des kits de mélange spécifique. Dans ces conditions, il semblerait que ce produit gélatineux injecté simultanément prenne de la place dans l’articulation, repousse les plaquettes et favorise son adhérence sur les surfaces articulaires. Personnellement, j’utilise le plus souvent cette stratégie thérapeutique synergique.

Quelles stratégies thérapeutiques associer au Plasma Riche en Plaquettes ? 

Si le Plasma Riche en Plaquettes relance efficacement les processus de réparation, une prise en charge inadaptée dans les suites fait glisser vers des écueils opposés. Première option, une reprise sportive trop rapide et trop précoce qui brise l’opportunité d’une véritable reconstitution tissulaire de qualité ! La cicatrice est trop fragile !

Seconde option, un repos trop prolongé sans mise en contrainte progressive. Cette fois, la jonction est fibreuse et enchevêtrée. Elle colle aux tissus voisins. La cicatrice est trop rigide !

UN PRP, RIEN QU’UN PRP : C’EST INUTILE !

Les plaquettes mettent environ dix jours à s’agréger et à former les ponts tissulaires. Au cours de cette période, il est d’usage de limiter au maximum les contraintes mécaniques sur la lésion. La vie quotidienne est possible. Néanmoins, il faut éviter de grimper les escaliers et d’arpenter les couloirs du métro. Alors, trouvez la formule qui vous convient : ascenseur, voiture, télétravail, RTT ou arrêt de travail en cas de traumatisme grave.

Il est même envisageable d’enchaîner deux à trois PRP à deux semaines d’intervalle pour grouper les périodes contraignantes et gagner du temps grâce à un unique protocole de reprise. Souvent, pour un problème au membre inférieur, vous enchaînez natation avec, puis sans pull-buoy, vélo, elliptique, trottinement, course, allonges, déplacements latéraux, appuis et enfin blocages.

APRES UN PRP, IL FAUT AMÉNAGER L’ENTRAÎNEMENT 6 A 12 SEMAINES 

Le tout réparti sur 6 à 12 semaines, en fonction de l’ampleur des dégâts initiaux, des contraintes mécaniques inhérentes à la discipline, de votre âge… et du calendrier des compétitions qui vous tiennent à cœur !

Avec un médecin du sport pratiquant, on peut négocier et les grands principes biologiques sont un peu élastiques ! Comme l’activité physique progressive, la kinésithérapie contribue à la formation d’une belle cicatrice à la fois souple et solide ! Dès le 10e jour, les massages sont les bienvenus. À ce même moment, commencent aussi les étirements doux, alors que le travail de freinage et d’équilibre ne débute qu’après 3 semaines.

Prenons l’exemple d’une fissure du tendon d’Achille qui traîne depuis 3 mois chez un coureur de fond de 42 ans. Si le PRP est réalisé au jour zéro (J0),

  • de J0 à J10 : marche minimum avec talonnette, crawl avec pull-buoy sans pousser au demi-tour et si sa piscine est facile d’accès.
  • J10 à J15 : marche raisonnable sans talonnette, vélo de salle en aisance respiratoire et crawl.
  • J15 à J21 : vélo de salle plus intense, elliptique facile, brasse.
  • J21 à J30 : elliptique plus intense.
  • J30 à J37 : marche lente sur tapis en pente de 3 à 10 %, trottinement sur place.
  • J37 à J45 : trottinement de 6 à 9 km/h pendant 5 à 30 min. À ce stade, notre marathonien poursuit la mécanisation de son tendon en joggant à petite vitesse et travaille intensément son cardio à la piscine, sur vélo ou sur elliptique !
  • J60: il reprend les séances au seuil.
  • J90: il renoue avec le fractionné, notamment les accélérations et les décélérations du 30/30… mais il garde en tête que ce type d’entraînement peut se faire désormais sur elliptique pour économiser son appareil locomoteur et sans altérer ses performances !

Pour que notre fondeur bénéficie d’une belle cicatrice, des compléments nutritionnels sont les bienvenus. Le silicium est au tendon et au ligament ce que le calcium est à l’os, un minéral qui relie les fibres et leur confère une cohésion souple. Le collagène et l’acide hyaluronique sont d’autres constituants présents dans les tendons et les ligaments. Ces produits sont mieux connus en cosmétologie. En effet, un tendon abîmé, avec des fibres dures et enchevêtrées, ressemble étrangement à une peau ridée…  


INFILTRATION OU PRP ? COMMENT CHOISIR ?

Une infiltration consiste à injecter dans la zone en souffrance des corticoïdes. Cette substance est un anti-inflammatoire puissant et efficace ! Cependant, il recèle plusieurs inconvénients. De façon logique, en réduisant l’inflammation, cette molécule inhibe les processus naturels biologiques initiaux qui succèdent à une blessure ; elle perturbe sérieusement la cicatrisation ! Bref, jamais d’infiltration sur des lésions récentes !

L’inflammation constitue également la première réaction à l’arrivée d’un microbe dans l’organisme. De fait, il existe un risque théorique d’infection dans l’articulation ou la zone infiltrée.

En pratique, lorsque le geste est réalisé dans des conditions rigoureuses d’asepsie, cette complication est exceptionnelle. Les études indiquent une fréquence de 1 sur 50 000 ! Il s’agit d’ailleurs plus souvent d’un microbe qui circulait dans le sang et qui a profité d’une perte de défense localisée pour se multiplier ! Donc, pas d’infiltration quand vous êtes malade et fiévreux !

Plus ennuyeux, le corticoïde injecté à un endroit précis passe aussi dans la circulation sanguine et vient perturber la réaction immunitaire de tout l’organisme. En cette période de pandémie, je ne prescris pas d’infiltration à mes patients !

Autre souci, le cortisol est aussi une hormone du stress qui détruit les protéines de structure pour en faire du glucose et de l’énergie. Il participe à déliter les ligaments et les tendons ! Pas d’infiltration dans ces tissus !

Cela dit, une infiltration de corticoïdes retrouve toute sa logique en cas d’emballement inflammatoire. Ces conditions existent si vous souffrez d’une poussée d’arthrose au cours de laquelle les globules blancs finissent par grignoter le cartilage sain. Ce geste est souvent pertinent à l’occasion d’une hernie discale rebelle essentiellement constituée d’œdème.

Enfin, l’infiltration est envisageable si vous présentez une bursite, à savoir une grosse ampoule inflammatoire profonde, répondant à un frottement tendineux.

Le PRP s’inscrit dans une logique inverse en stimulant la cicatrisation. Les anti-inflammatoires sont d’ailleurs contre-indiqués dans les jours qui suivent ce geste technique afin de ne pas entraver le processus naturel de reconstruction tissulaire. Et, vous le savez, en relançant les étapes harmonieuses de réparation, le Plasma Riche en Plaquettes pourrait même freiner l’inflammation anarchique … un peu comme les corticoïdes mais sans les effets délétères !

Cependant, certains décrivent des hyper-cicatrisations fibreuses à l’issue de cette technique. Dans mon expérience, et le PRP associé à une rééducation adaptée, je n’ai pas rencontré ce phénomène. Concernant les infections, pas de problème ! On peut même considérer que les plaquettes sont toujours injectées avec un peu de globules blancs qui sont là pour nous défendre contre les micro-organismes !

Triathlète adepte du cardiotraining et de la musculation - Médecin du sport - traumatologue du sport - nutritionniste du sport - diplômé en entraînement du sportif - Rédacteur en chef