L’hypothermie dans les activités outdoor, plus qu’un simple coup de froid !

L’hypothermie dans les activités outdoor, plus qu’un simple coup de froid !
L’hypothermie dans les activités outdoor, plus qu’un simple coup de froid !

Si l’être humain possède de remarquables facultés d’adaptation lui permettant de pratiquer des activités sportives dans des conditions environnementales extrêmement défavorables, il faut savoir que les désordres de la température corporelle, que ce soit en excès avec une hyperthermie ou en défaut avec une hypothermie, sont des pathologies graves et souvent rencontrées dans les pratiques sportives extérieures. En effet, lors de la pratique d’un sport, l’organisme doit réagir aux variations de température et notamment à sa diminution en cas de pratique dans un milieu froid. Le corps en exercice face au froid s’adapte bien mieux que face au chaud, car quand on fait du sport, on produit de la chaleur. Dans certains cas, la capacité de réaction du corps est dépassée et un accident peut arriver et on parle alors d’« hypothermie » ou « cryoplexie ». Ce sont les conditions météorologiques qui sont bien sûr à prendre en compte mais aussi le terrain de pratique comme l’altitude, la neige, la présence d’eau glacée sur le parcours…

Par le docteur Sandrine NAIL-BILLAUD, Fonds de dotation Ultra Sports Science et le docteur Patrick Basset, Médecin Anesthésiste Réanimateur, DOKEVER

La définition et les causes de l’hypothermie liées au sport

L’hypothermie survient lorsque l’organisme perd plus de chaleur qu’il n’en produit : la température corporelle chute et l’hypothermie se produit quand celle-ci descend en dessous de 35 °C et il faut alors redouter un arrêt cardio-respiratoire ou des troubles cardiaques si des mesures appropriées ne sont pas prises rapidement. Attention, en pratique, il est difficile de connaître la température en cas d’hypothermie puisque la plupart des thermomètres courants sont gradués en général à partir de 36 ou 36,5 °C.

  • Toute personne ayant subi un traumatisme au cours de sa pratique du sport et étant immobilisée peut souffrir d’hypothermie, quelle que soit l’origine du traumatisme. C’est pour cette raison qu’il faut toujours avoir une couverture de survie (cette fine feuille de papier métallique se plie et se transporte très aisément dans un sac) et en couvrir la victime ;
  • Les sports et séjours en montagne (et en haute montagne, surtout l’été) sont des circonstances à risque d’hypothermie. Avec notamment une avalanche ou une chute qui peuvent provoquer une hypothermie brutale. Attention, une chute en eau glacée produit également une hypothermie très rapide ;
  • Lors d’une immobilisation forcée pendant la pratique de son sport liée à des conditions météorologiques difficiles ou à des problèmes techniques. Dans ce cas, l’hypothermie est plus progressive et elle est souvent accompagnée de gelure et déshydratation.

Il faut également savoir que différents facteurs peuvent prédisposer au risque d’une hypothermie en plus de la pratique sportive prolongée au froid comme :

  • Le vent ;
  • Un équipement non adapté ;
  • La consommation d’alcool ou de cannabis/drogues ;
  • Déshydratation, consommation de boissons énergisantes ;
  • Prise de médicaments augmentant la sensibilité au froid : benzodiazépines, antidépresseurs, bétabloquants etc. ;
  • Certains états prédisposants : diabète, atteinte de la sensibilité, démence, certains troubles endocriniens…
  • La sensibilité individuelle et l’âge.

En conclusion, il est important de noter que l’enfant est très peu résistant au froid.

Les symptômes de l’hypothermie 

Les signes et symptômes d’une hypothermie sont liés à la température du corps :

  • 34 °C : il s’agit d’une hypothermie modérée : le sujet est fatigué, il a du mal à parler, ses mains et pieds sont engourdis, il frissonne beaucoup et sa peau est froide. À ce stade, des mesures de réchauffement peuvent être prises sur place pour que l’hypothermie ne s’aggrave pas : c’est le fameux point chaud détaillé dans le chapitre suivant ;
  • 32 °C : la peau est cadavérique et surtout signe très important : le sujet ne frissonne plus. Il peut tenir des propos incohérents, parfois violents et peut même prétendre avoir trop chaud ;
  • 30 °C : il est en état de stupeur, ses muscles sont raidis et sa peau est violacée ;
  • 28 °C : le sujet est dans le coma mais réagit encore, ses mâchoires sont crispées, sa respiration est irrégulière et son pouls est très lent ;
  • 25 °C : il ne réagit plus, la respiration s’est arrêtée, on ne sent plus son pouls et ses pupilles sont dilatées : c’est un état de mort apparente. Cependant, il n’est pas rare que, même à ce stade, le sujet puisse récupérer sans séquelle si une équipe spécialisée a pu mettre rapidement une réanimation en place. Car même privé d’oxygène, le cerveau est préservé plus longtemps si la température du corps est très basse ; en revanche, à 37 °C, le cerveau ne supporte l’absence d’oxygène que 3 minutes.

Comment prévenir une hypothermie ?

Quand le niveau d’hypothermie est léger entre 34 et 32 degrés si le sujet n’est pas incohérent, les consignes sont de bouger, d’utiliser des vêtements secs, de s’alimenter, de boire tiède si possible ou des boissons sucrées, de s’abriter du vent et d’essayer de se mettre à un endroit plus chaud.

C’est alors qu’il convient d’avoir sur soi un Kit point chaud et de l’utiliser : en effet si les secours peuvent isoler le sportif avec du papier bulle, le Kit Point Chaud contient 2 couvertures de survie à utiliser ainsi :

Utilisation du Kit Point Chaud en 4 points

  1. Isolez-vous du sol avec une des couvertures de survie renforcée,
  2. Changer vos vêtements pour vous mettre au sec et mettez la couverture de survie classique directement sur la peau,
  3. Avec la 2nde couverture de survie renforcée, créez un abri,
  4. Dans l’abri bien fermé, faites le point chaud : utilisez la bougie et le briquet.

Lien vers la vidéo : https://www.ultrasportsscience.org/action-hypothermie-hyperthermie-sport.php

Lorsque la température corporelle est plus basse que 32 °C , il s’agit de ne pas bouger brutalement le sujet, de ne pas le réchauffer trop rapidement et surtout de prévenir les secours.

Attention : les phases de réchauffement peuvent être parfois très douloureuses et s’accompagner de nausées et vomisse­ments. Mais avant d’arriver à ces stades d’hypothermie avérés, en montagne ou dans des zones possiblement froides, c’est l’équipement vestimentaire qui est bien sûr primordial avec des textiles isolant du froid et composés de soie, laine, fibres synthétiques du type polaire. Plusieurs couches de vêtements sont nécessaires, ainsi qu’un bonnet car le cuir chevelu, riche en vaisseaux sanguins, est une source majeure de perte de chaleur. Se munir si possible de boissons chaudes et de nourriture riche et sucrée.

Attention : les boissons alcoolisées ne protègent pas contre le froid et ne permettent pas de réchauffer, bien au contraire. En cas d’immobilisation forcée, il est très important de trouver un abri qui, même précaire, protégera des effets du vent (qui aggrave en général considéra­blement le froid ressenti). Il est par ailleurs indispensable de ne pas avoir la peau mouillée. Porter un vêtement mouillé refroidit le corps encore plus vite que de ne pas porter de vêtements (froid + humidité = danger). Aussi, il est primordial de ne pas garder des vêtements humides sur soi car l’humidité multiplie les effets néfastes du froid.

La prévention consiste à toujours consulter la météo avant de partir en montagne même l’été et avoir avec soi des outils d’orientation : carte, boussole, GPS, téléphone. Le respect des horaires est aussi très important pour éviter de s’égarer à la tombée de la nuit. Des équipements vestimentaires sont bien sûr nécessaires et doivent être adaptés à l’activité, et notamment des gants et bonnets pour éviter les refroidissements rapides car toute partie du corps non couverte est sujette à refroidir le sportif.

Les équipements individuels ne sont surtout pas à négliger :

  • Équipement adapté : taille, épaisseur ;
  • Protection suffisante aux extrémités du corps : gants, bonnet, cagoule, chaussettes.

Pour la protection vestimentaire, il convient d’appliquer le principe des trois couches (transfert, isolation et protection). Ainsi, en pratique on se couvre :

  • d’une couche de transfert : c’est celle qui ne garde
    pas l’eau ;
  • d’une couche d’isolation : c’est celle qui garde la chaleur en laissant évaporer l’eau (laine polaire ou laine). Elle agit comme tampon thermique ;
  • d’une couche de protection contre le vent et les intempéries (Gore-Tex®).

Ne pas oublier la protection des mains, des yeux et de la tête. Si les conditions extérieures deviennent extrêmes, on augmente la couche d’isolation. Autrefois, en alpinisme par exemple, il fallait se parer de sept ou huit couches pour ne pas avoir froid. Il faut se rappeler également qu’en milieu froid, il y a une forte perte de chaleur par la tête, qu’il faudra donc couvrir. Dans l’eau, le refroidissement est 20 à 30 fois plus rapide que dans l’air sec, aussi lorsqu’on est bloqué dans l’eau froide, il est paradoxalement préférable de ne pas bouger car l’exercice produit des calories qui s’échappent de la surface du corps sans le réchauffer. De plus, nager dans l’eau froide épuise, il faut donc si possible maintenir la nuque hors de l’eau car c’est là où se trouvent les récepteurs de la régulation de la température. 

Les signes précurseurs de l’hypothermie

hypothermie

Chez un coureur, ils peuvent inclure :

  • Frissons : Un des premiers signes, souvent accompagné d’une sensation de froid intense ;
  • Engourdissement : Sensation d’engourdissement, surtout dans les extrémités comme les doigts et les orteils ;
  • Fatigue : Une sensation accrue de fatigue et de faiblesse, même pour un effort modéré ;
  • Perte de coordination : Difficulté à effectuer des mouvements précis, avec une baisse de la dextérité ;
  • Confusion mentale : Difficulté à se concentrer, à parler ou à penser clairement, pouvant mener à des décisions irrationnelles ;
  • Changements d’humeur : Irritabilité ou comportement inhabituel, souvent causés par le stress physique ;
  • Respiration lente : Un ralentissement du rythme respiratoire peut également être un indicateur ;
  • Peau pâle et froide : La peau peut devenir froide au toucher et perdre sa couleur normale, notamment sur les extrémités. Avec des complications cutanées à envisager puisque l’exposition au froid peut également causer des brûlures comme des engelures au niveau de la peau.

Reconnaître ces signes précoces est crucial pour intervenir rapidement et éviter une aggravation de l’hypothermie.


Glossaire des différents termes pouvant être associés à une hypothermie

  • Onglée : engourdissement douloureux au bout des doigts.
  • Engelure : papules violacées siégeant aux extrémités préféren­tiel­lement aux pieds s’accompagnant d’œdème et de prurit.
  • Gelure : lésion profonde avec nécrose tissulaire par défaut de vascularisation.

Réaction du corps humain au froid extrême par plusieurs mécanismes physiologiques et comportementaux pour maintenir sa température interne :

  • Vasoconstriction : Les vaisseaux sanguins se contractent pour réduire le flux sanguin vers la peau, minimisant ainsi la perte de chaleur. Cela peut entraîner une peau pâle et froide ;
  • Frissons : Le corps génère de la chaleur par des contractions musculaires involontaires, ce qui produit de la chaleur pour réchauffer le corps ;
  • Augmentation du métabolisme : Le métabolisme de base peut augmenter pour produire plus de chaleur. Cela nécessite plus d’énergie, ce qui peut entraîner une augmentation de la consommation de calories ;
  • Comportements adaptatifs : Les individus peuvent adopter des comportements tels que se déplacer pour générer de la chaleur, s’habiller plus chaudement ou chercher un abri ;
  • Activation de la graisse brune : La graisse brune est une sorte de tissu adipeux, qui peut être activée pour produire de la chaleur sans frissons, en brûlant des calories ;
  • Modification de la respiration : La respiration peut devenir plus rapide et plus superficielle pour limiter la perte de chaleur par les voies respiratoires. ;
  • Sensation de froid : La perception du froid peut inciter à des actions préventives, comme éviter les environnements froids ou s’engager dans des activités pour se réchauffer.